Exonération des droits de succession en France pour les résidents Monégasques

11/01/2016

Exonération des droits de succession en France pour les résidents Monégasques

C’est avec beaucoup d’impatience et d’espoir que l’ensemble des fiscalistes de la place attendaient la décision de la Cour de Cassation du 2 octobre 2015.

La question posée à la plus haute juridiction était de savoir de quelle façon doivent être traités fiscalement des titres de société civile particulière monégasque dont l’actif est principalement composé d’immeubles sis en France, communément appelé « société civile à prépondérance immobilière ».

Deux possibilités se sont offertes au juge :

• Traiter fiscalement les titres de sociétés civiles particulières monégasques à prépondérance
immobilière en France comme des immeubles/droits immobiliers et les imposer en France en application de l’article 2 de la convention franco-monégasque 1er avril 1950,

• Traiter fiscalement les titres de sociétés civiles particulières monégasques à prépondérance
immobilière en France comme des valeurs mobilières entrant par conséquent dans le champ d’application de l’article 6 de la convention conclue entre la France et Monaco ce qui aurait pour conséquence les rendre imposables en Principauté.

La Cour de Cassation a tranché la question en confirmant que de l’immobilier français détenu par des résidents fiscaux monégasques au travers d’une SCP monégasque translucide ne relève pas des droits de succession français mais de la compétence exclusive de la Principauté de Monaco par application de l’article 6 de la Convention franco-monégasque signée le 1er avril 1950 en matière de succession.

Afin d’appréhender les enjeux de cette décision, il convient d’expliquer le raisonnement juridique qui a mené à celle-ci ainsi que son historique.

Notons tout d’abord l’article 2 de la convention qui dispose que:

« 1. Les immeubles et droits immobiliers faisant partie de la succession d'un ressortissant de l'un des deux États contractants ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans l'État où ils sont situés.
2. La question de savoir si un bien ou un droit a le caractère immobilier sera résolue d'après la législation de l'État dans lequel est situé le bien considéré ou le bien sur lequel porte le droit envisagé. »

Et d’autre part, l’article 6 prévoit que :

« Les actions ou parts sociales, ….. et tous autres biens laissés par un ressortissant de l'un des deux États auxquels ne s'appliquent pas les articles 2 à 5, seront soumis aux dispositions suivantes :

a) Si le de cujus était domicilié au moment de son décès dans l'un des deux États, lesdits biens ne seront soumis à l'impôt sur les successions que dans cet État ;(...) »

L’administration fiscale française a longtemps refusé de reconnaître les parts de SCI monégasques translucides à prépondérance immobilière en France comme un bien de nature mobilière relevant de l’article 6 de la Convention, par conséquent soumis exclusivement à la fiscalité successorale du lieu du dernier domicile du défunt titulaire des parts.

Pourtant, le Tribunal de Grande instance de Nice le 25 mars 2010 ainsi que la Cour d’appel d’Aix en Provence le 3 mai 2011, avaient tous deux considéré les parts d’une telle SCI - détenues par un ressortissant marocain fiscalement domicilié à Monaco - comme des biens meubles incorporels relevant de la compétence fiscale exclusive de Monaco en matière de droits de succession dès lors que leur titulaire était domicilié fiscalement à Monaco à son décès.

Cependant, dans une décision rendue le 9 octobre 2012, la Cour de Cassation donnait une interprétation différente, en assimilant les parts de SCI monégasque translucide (SCI traditionnelle de location, gestion dans laquelle les associés ne sont pas directement propriétaires de l’actif social mais de parts sociales) aux parts de SCI transparente (SCI d’attribution dans laquelle les associés sont considérés comme personnellement propriétaires des actifs de la SCI au prorata de parts détenues).

Se fondant sur un échange de lettre entre les deux pays (voir note n°1) la haute juridiction considérait ainsi que les parts de SCI étaient imposables en France en tant qu’immeuble ( article 2 de la Convention) sans distinguer les parts de sociétés civiles transparentes et celles des sociétés civiles translucides.

Cette position a était fortement critiquée par la doctrine tant il était univoque que cet échange lettre étendait le champ d’application de l’article 2 de la convention aux sociétés civiles immobilières d’attribution (dotée de la transparence fiscale) et non aux sociétés civiles translucides.

Suite à cet arrêt qui casse et annule l’arrêt rendu par la Cour d’appel d’Aix en Provence, l’affaire est renvoyée devant les tribunaux.

Dans sa décision du 2 Octobre 2015, la Cour de Cassation dans sa formation plénière suit le raisonnement du tribunal de Grande instance de Nice et de la Cour d’appel d’Aix en Provence.
La décision de la Cour de Cassation du mois dernier, nous permet donc de confirmer notre analyse quant à l’imposition exclusive à Monaco des parts de société civile monégasque détenant un bien immobilier en France dès lors que la convention franco-monégasque sur les droits de succession s’applique.

Il est important de préciser à ce sujet le champs d’application de la convention conclue en entre la France et Monaco en matière de succession . La convention vise en effet uniquement les ressortissants français ou monégasques. Pouvons nous étendre le bénéfice de cette convention et donc la portée de cet arrêt aux ressortissants d’état tiers?

La jurisprudence Biso ( Conseil d’Etat, 11juin 2003, concernant la taxe de trois fois la valeur locative) avait pour la première fois permis l’application à un résident d’un Etat tiers (Monaco) de la clause de non discrimination contenue dans la convention signée entre la France et l’Etat dont le résident monégasque avait la nationalité. Le bénéfice de cette clause aux personnes qui ne résident dans aucun des deux Etats signataires est soumis a certaines conditions et l’analyse de chaque convention est nécessaire.

Dans l’hypothèse où le résident monégasque, associé de la SCI détenant un bien immobilier en France, bénéficie d’une clause de non discrimination contenue dans la convention fiscal signé entre la France et son pays national, il peut alors demander l’application de la convention franco monégasque sur les droits de succession et donc le bénéfice de cet arrêt de jurisprudence.

Les conséquences de cette décision sont donc importantes en matière de fiscalité des non résidents en France.

Dans l’hypothèse où le de cujus résidait en principauté depuis au minimum cinq ans avant son décès, les parts de SCI monégasque seront soumises aux droits de successions à Monaco et non pas France, nonobstant le lieu de résidence du/des héritier(s).

Pour mémoire, voici le barème fiscal des droits de successions en France en ligne direct (parents/enfants) après un abattement de 100.000 Euros par enfant :

Montant taxable après abattement - Taux
Moins de 8.072 € - 5%
Entre 8.072 € et 12.109 € - 10%
Entre 12.109 € et 15.932 € - 15%
Entre 15.932 € et 552.324 € - 20%
Entre 552.324 € et 902.838 € - 30%
Entre 902.838 € et 1.805.677 € - 40%
Supérieure à 1.805.677 € - 45%

En application de la loi monégasque, il n’y aucun droits de succession en ligne directe et le taux maximum est de 16% entre personnes non parentes.

Lors de l’achat d’un bien immobilier en France par un résident (ou future résident) Monégasque il est impératif d’analyser la possibilité de bénéficier de cette exonération de droits de succession, en vérifiant la convention fiscal entre la France et son pays national.

On peut déjà noter que les ressortissants Russes résidents en Principauté pourront bénéficier de cette exonération car la convention Franco-Russe permet l’application de la clause de non discrimination aux ressortissants Russes résidants dans un état tiers.

On peut également rappeler que pour ceux qui n’aurait pas la chance d’être protéger par une convention fiscale avantageuse et ne pourrait donc tirer avantage de la décision de la Cour de Cassation d’octobre dernier, qu’il est néanmoins avantageux de détenir un bien immobilier en France au travers d’une SCP monégasque au lieu d’une SCI française.

L’un des avantages est la non imposition en France des comptes courant d’associés détenus dans la SCP au décès de l’associé. L’autre avantage est la possibilité d’utiliser cette SCP pour devenir d’autres actifs tels que des comptes en banque, des ouvres d’art, un bien immobilier en principauté, etc. sans imposition en France.

En guise de conclusion, il est important de rappeler une nouvelle fois les avantages que peut procurer le recours à une société civile particulière monégasque par rapport à une société civile immobilière française.

D’autres structures tels que les holdings et certains fonds Luxembourgeois, les holdings Libanaises ou les structures Belges permettent également d’intéressantes optimisation du patrimoine immobilier français.

Néanmoins la structure monégasque est souple, simple et efficace pour organiser la transmission du patrimoine familiale. Elle permet également dans le cas de résidents monégasques une réelle substance en principauté.

Note n°1: Echange de lettres entre la France et la Principauté de Monaco du 16 juillet 1979 concernant la convention franco-monégasque du 1er avril 1950: « Pour l'application du paragraphe 1er de l'article 2 de la convention susvisée, les immeubles et droits immobiliers représentés par des actions et parts sociales de sociétés ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance ne sont soumis à l'impôt sur les successions que dans l'Etat où ils sont situés. »

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Cet article parait dans la nouvelle édition No 16 de la revue Monaco Business, une revue Business Russe de Monaco.

http://www.monacobusinessmagazine.com/

http://issuu.com/monacobusinessmagazine/docs/monaco_business_16?e=5069758/32989617

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